États-Unis • Vers un leadership climatique bottom up ?
Le secteur électrique américain est un cas plus que révélateur de l’importance des acteurs non-étatiques. Nous analyserons en trois parties l’évolution récente des émissions de CO2 du secteur électrique des États-Unis et le rôle des différents acteurs non-étatiques.
2018
États-Unis
Germán Bersalli • Chercheur associé, Univ. Grenoble Alpes, CNRS, INRA, Grenoble INP, GAEL
Introduction
Le secteur électrique américain est un cas plus que révélateur de l’importance des acteurs non-étatiques. En juin 2017 le gouvernement fédéral annonçait la sortie des États-Unis de l’Accord de Paris semant des forts doutes sur la capacité du pays à poursuivre la naissante décarbonation de son économie. Cependant, des gouverneurs, des maires et des PDG des entreprises américaines ont immédiatement réagi. Quelques heures après l’annonce du gouvernement Trump, une coalition sans précédent regroupant aujourd’hui plus de 2 700 États, villes et entreprises, « s’est ralliée » à l’accord de Paris sous le slogan « We Are Still In ». Comment ces initiatives se traduisent-elles par des mesures concrètes au niveau des États, des villes et des entreprises ? Seront-t-elles suffisantes pour assurer une trajectoire de décarbonation profonde du secteur électrique américain ? Afin d’apporter des éléments de réponse, nous analyserons en trois parties l’évolution récente des émissions de CO2 du secteur électrique des États-Unis et le rôle des différents acteurs non-étatiques.
Sommaire
1 • Le défi faramineux de décarboner le système électrique américain
• Les émissions du secteur électrique continuent à diminuer
• Le déclin du charbon se confirme face à la montée du gaz naturel et des EnR
2 • Le dynamisme des villes et des Etats s’oppose au retrait du gouvernement fédéral
• Une politique climatique fédérale hautement insuffisante
• Les États ouvrent la voie des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique
• Des villes de plus en plus engagées
3 • Le rôle des entreprises et des initiatives citoyennes
• Des entreprises intègrent la dimension climatique dans leurs stratégies
• Le mouvement « démocratie énergétique »
Conclusion
Une analyse des engagements enregistrés et quantifiés d’acteurs sous-nationaux et non-étatiques aux États-Unis (America’s Pledge, 2018 ; Climate Action Tracker, 2018) suggère que ces engagements, s’ils sont mis en oeuvre, pourraient entraîner une réduction des émissions de 17 % à 24 % en 2025 par rapport aux niveaux de 2005.
Alors que le gouvernement fédéral a fortement changé sa politique climatique, notamment avec la décision de sortir de l’Accord de Paris, le leadership américain en matière de climat demeure bien vivant. Il s’agit d’un nouveau type de leadership dit bottom up animé par la conviction des citoyens, le leadership des villes et des États ainsi que par la capacité d’innovation de ses entreprises, permettant non seulement de prendre des mesures concrètes aujourd’hui mais aussi de jeter les bases d’un futur partenariat avec le gouvernement fédéral. La poursuite de la baisse des émissions de CO2 du secteur électrique américain dira, dans les prochaines années, si les dynamiques portées par les États fédérés auront plus fortes que la volonté fédérale de relance du charbon, à rebours des évolutions économiques récentes.